Avec l’adoption croissante du concept du « New Work », le travail quotidien et son écosystème évoluent rapidement. Comment pourrait se dessiner l’avenir de l’apprentissage, ou « New Learning », pour que collaborateurs et entreprises tirent pleinement parti de cette nouvelle approche du travail ?

Carole Bagnoud
Consultante chez Great Place To Work
Le New Work est une approche philosophique du travail, théorisée par Frithjof Harold Bergmann, qui la considérait comme un contre-modèle au capitalisme traditionnel. Le mouvement a pris son essor dans l’industrie automobile des années 1970, alors que celle-ci était en crise. Bergmann a conseillé General Motors pour trouver des solutions afin de ne pas licencier tous ses employés. Selon lui, une nouvelle dynamique qui modifiait la perception du travail se répandait déjà dans le monde entier.
Bouleversement de la société
Dans le contexte du passage d’une société de l’ère industrielle à l’ère informationnelle, Bergmann a commencé à remettre en question la conception traditionnelle du travail. Les collaborateurs ont été interrogés pour la première fois sur leurs véritables désirs. La vision du New Work, telle que décrite par Bergmann, repose sur l’idée que lorsque le sens du travail est clairement défini, cela conduit à une plus grande satisfaction, une réduction des absences pour maladie, et finalement, à une amélioration de la rentabilité. Le travail n’est désormais plus seulement motivé par la rémunération, mais par des motivations plus profondes qui concernent aussi bien l’individu que l’entreprise dans son ensemble.
Qu’est-ce que le New Work ?
Dans le contexte de l’entreprise, on associe aujourd’hui ce concept à des possibilités de travail à domicile, à des aménagements en open space et à des horaires de travail flexibles. Cependant, en réalité, le véritable cœur du New Work concerne les individus plutôt que les structures. Il prône l’autodétermination plutôt que l’influence extérieure, et encourage la responsabilité personnelle au lieu de la stricte hiérarchie.
Il ne s’agit évidemment pas de dire que les collaborateurs font ce qu’ils veulent, tant qu’ils en assument la responsabilité. Cela signifie plutôt un changement dans la collaboration, dans laquelle chacun peut apporter sa contribution personnelle. La collaboration devient à la fois plus individuelle et plus transversale.
Carole Bagnoud, Consultante chez Great Place To Work, indique : « Le New work reconnaît que les organisations ne sont pas des machines et que les employés sont bien plus que de simples ressources humaines. Dans une culture d’entreprise fondée sur la confiance, les dirigeants créent les conditions qui permettent aux employés de développer tout leur potentiel et donc de donner le meilleur d’eux-mêmes. Cela implique de les traiter avec équité et respect, mais aussi de leur donner la flexibilité dont ils ont besoin. Cela nécessite un nouveau style de leadership et une compréhension mutuelle de ce que devrait être la collaboration. Le conseil principal est d’impliquer les employés dans les processus, de leur demander ce dont ils ont besoin et comment ils souhaitent travailler ».
L’augmentation du travail à distance et l’expansion de la numérisation exigent des compétences numériques approfondies de la part des collaborateurs et des entreprises dans leur ensemble. En outre, malgré cette évolution, ou peut-être à cause d’elle, de nouvelles compétences non techniques, notamment interpersonnelles, gagnent en importance.
La remise en question comme stratégie
Pour pouvoir « travailler autrement », il faut donc de nouvelles compétences. Et ce n’est pas tout, car le new work représente une toute nouvelle façon de penser, en particulier dans le contexte de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Cela commence dès la formation scolaire, où les anciennes questions deviennent le nouveau centre d’intérêt : Qu’est-ce que je sais bien faire ? Qu’est-ce que je veux en faire ? Et à quoi cela sert-il ? Ce sont précisément ces questions qui doivent être posées de manière récurrente dans toutes les voies de formation initiale et continue des carrières.
Cependant, dans le contexte du New Work, de nouvelles incertitudes émergent constamment et nécessitent une remise en question régulière. Si le cœur de la question est l’autodétermination et la responsabilité, il faut également être clair sur le degré d’autodétermination que l’on peut et doit avoir. Du côté de l’entreprise, cette question relève du domaine des cadres et des responsables de la formation : Dans quelle mesure les collaborateurs peuvent-ils agir de manière autonome ?
New Learning
L’économie et la société sont devenues plus rapides et imprévisibles. L’agilité (nouveau concept de travail selon lequel les personnes doivent être plus flexibles mentalement et réagir plus rapidement dans un environnement changeant) n’est pas seulement une façon d’y faire face, elle est devenue une obligation. Cela doit également avoir des répercussions sur la manière dont l’éducation est abordée et proposée. Dans le domaine de la formation scolaire et professionnelle, l’apprentissage moderne se répand de plus en plus : il comprend un mélange de médias et de canaux (images, vidéos, articles de journaux, en ligne, etc.), un accompagnement transversal et des plateformes d’apprentissage en ligne, pour ne citer que quelques exemples.
De la même manière, de nombreuses institutions de formation continue ont fait des progrès et se sont engagées dans le New Learning. Certains apprennent peut-être mieux dans le cadre d’organisations traditionnelles, tandis que d’autres, en particulier les jeunes générations, sont plus enclines à opter pour des méthodes d’apprentissage flexibles, modulaires et polyvalentes. Ces méthodes leur permettent de suivre des modules d’apprentissage de manière non consécutive, de les répéter, et d’accéder à divers supports tels que des livres, des documents, des vidéos en ligne, tout en ayant la possibilité de travailler à distance.
Une mise en œuvre progressive
Parler du concept et y réfléchir est une chose. L’introduire en est évidemment une autre. Rompre avec les processus existants et mettre en œuvre l’approche globale du New Work en peu de temps n’est pas – et ne doit pas être – à la portée de toutes les entreprises. De même, les mesures comme le télétravail et l’aménagement des bureaux en open space sont tout à fait justifiées tant que les pièces du puzzle forment une image cohérente.
Laisser un commentaire