Mon travail extraordinaire

Foodstyling: quelques astuces

07.07.2022
par Akvile Arlauskaite

Leur travail consiste à mettre les aliments en valeur. Dans l’interview qui suit, les photographes culinaires Jules Moser et Pascalle Stettler nous parlent de leur travail quotidien et nous présentent quelques astuces en matière de foodstyling.

Comment vous êtes-vous lancés dans le domaine de la photographie culinaire?

P.S. En tant que photographe de formation, je me suis découverte une passion pour la photographie alimentaire dès ma formation. Ceci surtout parce qu’en tant que personne atteinte de la maladie cœliaque, je voulais publier des recettes sans gluten – avec des images qui mettent l’eau à la bouche. Je voulais que le mot sans gluten soit associé à une nourriture délicieuse. Cela impliquait de photographier, mais aussi de dresser et de styliser les plats.

J.M. Je suis photographe indépendant et je me suis dirigé vers la photographie alimentaire suite à un mandat dans le cadre duquel je devais photographier des glaces. Le styling m’a très rapidement fasciné.

En quoi consiste votre travail quotidien?

J.M. En général, notre journée commence par le traitement des photos du dernier shooting, puis par la préparation du studio pour le prochain. Dès que les clients arrivent chez nous, nous discutons de ce qui est prévu et de leurs attentes. Ensuite, les plats sont préparés, disposés sur la vaisselle appropriée, placés dans le set et décorés. Nous nous chargeons de cette partie, en particulier pour les petits shootings où nos clients ne peuvent ou ne veulent pas s’offrir les services d’un styliste supplémentaire. Pour les autres commandes, nous travaillons avec des stylistes culinaires vraiment formidables. La composition stylisée est ensuite photographiée, mise en page et adaptée si nécessaire. Si des cuisiniers travaillent en parallèle et préparent rapidement des plats, nous pouvons photographier jusqu’à douze menus par jour.

Quand le besoin de stylistes alimentaires s’est-il fait sentir dans le secteur?

J.M. Il y a 35 ans, on avait déjà recours à des stylistes alimentaires pour réaliser des photos de qualité – des cuisiniers expérimentés avec un talent pour la présentation des plats.

P.S. Je pense qu’aujourd’hui le métier est plus connu grâce aux réseaux sociaux. Il y a donc certainement plus de personnes qui se considèrent comme des stylistes alimentaires.

Ce métier est-il répandu en Suisse?

J.M. Pas vraiment. En Suisse, les stylistes alimentaires professionnels connus pour leur style se comptent sur les doigts des deux mains.

Quelles compétences sont nécessaires dans votre métier?

P.S. L’essentiel est d’avoir l’œil pour les couleurs et les formes. De plus, les stylistes alimentaires doivent bien connaître les aliments et avoir le talent de mettre en scène les plats afin qu’ils aient un aspect appétissant. Ils doivent donc savoir comment assembler les différents éléments du plat et à quoi le résultat final doit ressembler.

J.M. Les photographes culinaires choisissent la lumière et la perspective appropriées. Si l’on photographie un beau plat avec une mauvaise lumière, la photo ne sera pas bonne malgré le stylisme alimentaire. L’inverse est également vrai. C’est pourquoi il est important de pouvoir travailler en équipe en tant que food stylist.

Comment peut-on acquérir ces compétences?

P.S. En Suisse, il n’existe pas de formation dans ce domaine. En règle générale, les stylistes alimentaires accèdent à ce métier par le biais de leur travail de cuisinier. Alors qu’ils connaissent déjà les aliments, ils acquièrent d’eux-mêmes les compétences en matière de stylisme alimentaire au fil des ans.

J.M. Travailler quotidiennement avec des cuisiniers et des stylistes permet d’apprendre beaucoup de choses. De plus, la passion pour la photographie culinaire nous permet d’acquérir des compétences en matière de stylisme. L’un ne fonctionne qu’à moitié sans l’autre.

Concrètement, à quoi faites-vous attention lorsque vous disposez les aliments?

P.S. Nous utilisons toujours des produits frais et beaux. Une pomme avec une tache brune n’a pas sa place sur nos photos, même si on peut la retoucher après coup.

J.M. L’angle sous lequel la nourriture est placée est également important. Si nous photographions un morceau de viande entamé, nous le plaçons sur l’assiette de manière à ce que la coupe soit bien exposée à la lumière, afin que la structure et la couleur soient reconnaissables. La perspective joue également un rôle important. Nous ne photographierions pas un burger vu d’en haut par exemple car ses nombreuses couches ne sont bien reconnaissables que sur le côté.

Y a-t-il des astuces que vous utilisez régulièrement pour le foodstyling?

J.M. Pour les soupes avec garniture, comme les légumes, nous plaçons une petite coupelle à l’envers dans le bol. On a ainsi besoin de moins de soupe et tous les légumes reposent sur le dessus au lieu de tomber au fond. On peut aussi utiliser de la purée de pommes de terre pour remplir le bol de soupe. En général, nous ne trichons pas. Nous misons plutôt sur l’authenticité et la fraîcheur: le décor est prêt, le plat arrive, la photo est prise et c’est tout. Il est essentiel qu’il ne s’écoule que très peu de temps entre le dressage et l’image finale. Certains préfèrent tricher et utilisent de la colle à la place du fromage ou de l’huile de moteur à la place du sirop d’érable. Chez nous, cela n’existe pas. L’avantage de ne pas utiliser de telles substances toxiques est que les aliments sont encore comestibles après le shooting.

Quels aliments sont particulièrement difficiles à styliser?

J.M. La viande. La texture doit parfaitement apparaître sur la photo afin qu’on reconnaisse le point de cuisson. Cela ne peut pas être retouché après coup. Les poissons frais entiers sont également très difficiles à styliser. Premièrement, parce qu’ils sont incroyablement glissants et ne tiennent pas en place. Et deuxièmement, parce qu’ils tressaillent encore lorsqu’ils sont extrêmement frais.

Y a-t-il quelque chose que vous n’aimez pas du tout voir dans votre assiette?

P.S. Sur les photos, je n’aime pas trop les épinards cuits. On peut certes les styliser, mais je trouve qu’ils ne sont pas très photogéniques et qu’ils n’ont donc souvent pas l’air très appétissants.

J.M. Je n’aime pas les arrangements où l’on voit que l’on a joué avec la nourriture, par exemple un visage faits avec des légumes. En d’autres termes, des choses qui n’ont en fait plus rien à voir avec l’art culinaire.

Tout bien considéré, quel est selon vous le plus grand défi du stylisme alimentaire?

P.S.: Ce que je trouve le plus difficile, c’est que les goûts de plusieurs personnes impliquées dans un shooting peuvent être totalement différents. Il faut donc proposer un styling qui satisfasse tout le monde – même si cela signifie qu’il faut parfois mettre ses goûts personnels de côté.

Et qu’est-ce qui vous plaît le plus?

P.S.: C’est super excitant de voir à quel point un plat peut paraître différent dans deux assiettes différentes. C’est pourquoi j’aime composer de nouvelles combinaisons à partir de notre stock. Ainsi, un nouveau tableau se dessine à chaque fois. Mais ce que j’aime le plus, c’est quand je peux surprendre les clients. Par exemple, lorsqu’une assiette ne leur plaît pas au départ, mais que l’on constitue ensuite un magnifique ensemble qui rend le plat exceptionnel.

Interview Akvile Arlauskaite
Photos zVg

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